Que faire si j’ai des idées suicidaires ?

Temps de lecture : environ 7 minutes

Nous avons vu en Partie 1 de cet article comment vérifier si un proche a des idées suicidaires ou non. La Partie 2 aide à savoir comment réagir lorsqu’un proche a effectivement des idées suicidaires.
Cet article est destiné aux personnes qui souffrent elles-mêmes d’idées noires.

Une crise suicidaire se caractérise par un désespoir intense, des idées noires, un épuisement physique et psychologique, des troubles du sommeil, ainsi qu’un sentiment d’isolement.

Cette situation est insupportable à vivre, mais sachez qu’il existe toujours d’autres solutions qui peuvent fonctionner, et toujours quelqu’un pour qui vous comptez…

Comment fonctionne la crise suicidaire ?

Un constat revient systématiquement lorsqu’on parle avec
une personne suicidaire, et met la lumière sur sa situation :

Une personne suicidaire n’a jamais envie de mourir.
Elle a juste envie d’arrêter de souffrir.

La plupart du temps, vous avez déjà essayé beaucoup de choses pour améliorer votre situation, mais vous avez l’impression que ça n’a pas marché, ou que ça n’a pas suffi. Mais vous êtes épuisé et vous en avez marre de vous battre. Vous avez l’impression qu’il n’y a rien d’autre que vous puissiez faire, et les pensées suicidaires s’installent.

La crise suicidaire fonctionne comme un poisson-lanterne, un prédateur qui vous attire vers lui avec une lumière artificielle : il vous leurre dans sa direction, rend le reste invisible, et tente de vous piéger. C’est pour cette raison que plus on se sent suicidaire, plus il est difficile de voir que d’autres solutions existent.
Ce sentiment est renforcé par l’épuisement physique et moral, qui amoindrit votre capacité d’effort et rend donc beaucoup plus difficile d’essayer de nouvelles choses.

C’est pour ces raisons qu’il est nécessaire de se faire aider par les autres (proches et professionnels) pour traverser cette période, et non pas parce que vous ne seriez pas assez fort ou méritant ! Vous aurez besoin d’autres phares qui s’allument pour vous éloigner de la lanterne du prédateur, et sortir la tête de l’eau.

La meilleure chose que vous puissiez faire pour vous aider sur le moyen terme, c’est de choisir des personnes de confiance et les informer de la situation. Idéalement, choisissez au moins deux de vos proches (afin de pouvoir contacter le deuxième si jamais le premier n’est pas disponible), et un professionnel de santé : votre médecin généraliste, psychologue, psychiatre.
Il est difficile de se confier à quelqu’un sur ce genre de situation, c’est normal :
– Le sujet du suicide est tabou, donc il est aujourd’hui compliqué de l’aborder sans se sentir mal-à-l’aise.
– Il s’agit aussi d’un sujet intime, donc vous ne souhaiterez pas en parler à n’importe qui, et rechercherez quelqu’un en qui vous pouvez avoir confiance.
– Expliquer sa situation demande un effort difficile à mobiliser quand on est épuisé.
– La crise suicidaire va vous donner l’impression d’être un fardeau pour les autres, et vous rendre réticent au fait de vous reposer temporairement sur eux. C’est un leurre !

 

Quels services d'urgence contacter

– Avant, pendant ou après une tentative : appeler le 15 (SAMU)

– Si vous avez pris plus de médicaments que vous n’auriez dû, ou un produit toxique : appeler le Centre Anti-Poison (CAPTV)

– Contacter votre médecin traitant/psychologue/
psychiatre, et l’un de vos proches

– Si vous avez besoin d’un moment d’écoute, gratuitement : appeler Suicide Écoute au 01 45 39 40 00

Ce que vous ne devez pas vous dire

♦ « Je ne mérite pas d’aller mieux. » Comment osez-vous ? Chaque vie est précieuse et utile, et laisse son empreinte sur le passage du temps. Vous ne pouvez pas, et n’avez pas, à essayer de juger de la valeur de votre propre vie, alors oubliez cette idée… Votre droit à la vie est inviolable et sacré, et vous n’avez pas à chercher à mériter ce droit.

♦ « Je suis un poids pour les gens que j’aime. » Croyez-moi, vos proches préfèrent très largement vous rendre service, que vous leur fassiez confiance, et vous aider dans cette période, plutôt que votre disparition.
Les études montrent que chaque suicide a des conséquences sérieuses sur au moins 6 autres personnes, et que les proches de personnes suicidées ont davantage de risques de commettre eux-mêmes une tentative de suicide un jour…

♦ « Il n’y a plus rien qu’on puisse faire. » Heureusement, c’est faux : cette impression est progressivement provoquée par la crise suicidaire, qui agit comme un bandeau sur les yeux et vous masque les possibilités restantes ainsi que les moyens de les atteindre. Quelqu’un peut vous aider à supprimer ce filtre, et vous disposez encore des ressources nécessaires pour le faire.

♦ « Si je me tue, je ne me sentirai pas mieux, mais au moins je ne sentirai plus rien. » Les gens qui fait une tentative de suicide en sautant d’un pont et qui ont survécu disent tous la même chose : « au moment où j’ai sauté, j’ai regretté immédiatement de l’avoir fait, et j’aurais aimé ne pas l’avoir fait ».
Ne plus rien sentir du tout n’est pas mieux que ressentir de la douleur, parce qu’il n’y a qu’en étant vivant que vous pourrez de nouveau faire l’expérience des émotions positives et des expériences pour lesquelles vous aimiez la vie.
Si, selon votre religion ou vos croyances, vous croyez par exemple à la réincarnation, c’est un sujet très intéressant et que je ne connais pas ; je suis sûre que nous pourrions avoir une conversation spirituelle fascinante. Restez en vie pour que nous puissions l’avoir !

Ce que vous pouvez faire

♦ Continuer à vous battre. Même si vous accrocher à la vie tel un hippocampe à une algue était la seule que vous puissiez faire actuellement, ce serait déjà suffisant. Vous êtes tout à fait capable d’y arriver, et vous serez fier de vous quand vous regarderez votre parcours dans quelques années ! Ceux qui n’ont pas laissé tomber ont tous surmonté leur crise suicidaire…

♦ Vous entourer. C’est extrêmement important, même si ce n’est malheureusement pas facilité par la période actuelle. Passez du temps, physiquement ou virtuellement, avec des gens qui sont au courant de votre situation et vous soutiennent, ou aussi avec d’autres qui n’ont pas ces informations mais vous font penser à autre chose.

♦ Un pas après l’autre. Les études sur certains traitement de la dépression (voir l’activation comportementale) montrent que, quand vous n’avez presque plus de forces, continuer à faire des choses selon votre niveau d’énergie est étonnamment la meilleure façon de le faire remonter.
Ne comparez pas avec la quantité de choses que vous pouviez faire quand tout allait bien. Selon vos capacités actuelles, choisissez une seule chose, pour commencer.
Une chose par jour. Ne pas rester en pyjama et mettre des vrais vêtements. Ou prendre une douche. Ou vous faire un vrai repas (même des pâtes). Laver une assiette. Écrire une phrase. Votre épuisement cessera de s’amplifier, et progressivement, vous pourrez de nouveau en faire un petit peu plus chaque jour.

♦ Vous autoriser à vous reposer. Cela va de pair avec le fait de faire des choses selon votre niveau d’énergie : l’épuisement psychologique est un vrai épuisement, qui se voit au niveau neurologique. Vous avez réellement besoin de vous reposer davantage. C’est en partie pour cela que, si vous travaillez, vous êtes éligible à ce que votre médecin traitant vous mette en arrêt de travail.
Le partenariat avec un professionnel de santé peut être utile pour forcer votre emploi du temps à vous laisser souffler. Si vous êtes étudiant, contactez vos responsables de formation, et, sans expliquer plus que ce que vous ne voudriez (un mot de votre médecin pourra vous aider), demandez quels aménagements sont possibles pour ne pas vous mettre en échec.
Il n’y a pas de honte à demander de l’aide, ou à demander à sortir des cases prévues. Si vous aviez une maladie, physique, vous n’auriez pas honte de vous faire aider, alors donnez autant d’importance à votre santé psychologique !

♦ Trouver UNE raison de rester en vie. Une raison de continuer. S’il y en a plusieurs, bien sûr, trouvez-les toutes. Il y en a toujours au moins une. Trouver une toute nouvelle raison de tenir à la vie est déjà une bonne raison.
Trouvez quelle est votre raison de vivre et comment elle vous a aidé à tenir jusque là ; exploitez cette force, et accrochez-vous pour elle !

♦ Vous souvenir que, même si vous en êtes sûr, ce n’est pas vrai qu’il n’y a plus de solutions. C’est la crise suicidaire qui parle. Même un nouveau départ à zéro peut vous apporter du positif : si vous choisissez de tout laisser tomber pour aller vendre des fleurs en Irlande, vous vivrez une expérience incroyable !

Nous avons vu dans cette série d’articles comment mieux comprendre et appréhender une crise suicidaire, que ce soit pour vous ou pour les autres.

J’espère que vous avez maintenant les informations nécessaires pour vous sentir préparés à réagir. Si vous avez une question ou si vous souhaitez échanger, n’hésitez pas à me contacter pour le faire !

Prenez soin de vous.

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19560cookie-checkPrévention du suicide – Partie 3